Le vendredi 18 décembre 2009, l’ARCEP (l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes) a décidé d’attribuer la quatrième licence mobile 3G à Free mobile.
Pour rappel, un premier appel à candidatures avait été lancé en mars 2007 (1). Alors que la société Free était le seul candidat en lice, l’ARCEP avait rejeté sa candidature (2) pour non-respect des critères de qualification (3). En effet, la société Free était dans l’incapacité de garantir le paiement en une fois de la redevance fixée à 619 millions d’euros. Elle avait d’ailleurs demandé une modification des modalités financières de l’attribution de la licence que le Conseil d’Etat lui avait refusée bien qu’il ait précisé que le montant fixé ne l’était pas définitivement (4). Face à cet appel d'offre infructueux, le gouvernement décida de scinder l'attribution de cette licence portant sur un bloc de fréquence de 15 Mhz en 3 lots de 5 Mhz. Le montant fut fixé en juin 2009 par la Commission des Participations et des Transferts à 240 millions d’euros le lot (5). Un nouvel appel d’offre a donc été lancé en août 2009 auquel la société Free a été, une fois de plus, la seule à répondre en tentant de satisfaire aux critères posés par l'ARCEP (6). Peu après, l’ARCEP a déclaré que le dossier de candidature était recevable et que sa décision serait connue avant la fin de l’année 2009 (7).
Par la décision n° 2009-1067 du 17 décembre 2009, la candidature de la société Free Mobile a été retenue par l’Autorité de régulation qui souligne que cette arrivée « devrait avoir un effet favorable sur la dynamique du marché de la téléphonie mobile » (8).
En ouvrant sa porte à un quatrième opérateur, la France rejoint nombre de pays européens comme la Grande-Bretagne ou encore l’Espagne qui, depuis plus de cinq ans, ont permis l’accès à leurs marchés nationaux respectifs à plus de trois opérateurs (9).
Les engagements de la société Free Mobile
Face à la pression exercée par les opérateurs historiques, une telle ouverture au « nouvel élu » ne pouvait se faire sans respecter certains critères et sans offrir de sérieuses garanties (10) :
- ouvrir commercialement son réseau mobile dans les deux prochaines années et couvrir d’ici huit ans, 90% de la population dans son réseau 3G.
- couvrir 25% de la population avant de signer tout accord d’itinérance avec les opérateurs concurrents Orange, Bouygues Télécom et SFR, afin de lui permettre de proposer des forfaits.
D’autres acteurs s’intéressent de près à l’arrivée de la société Free comme nouvel opérateur : les Opérateurs de Réseau Mobile Virtuel appelés « MVNO ». L’ARCEP et le Conseil de la Concurrence ont en effet formulé des recommandations précises pour améliorer les conditions d’hébergement de ces opérateurs qui souhaitent augmenter leur part de marché (11). La quatrième licence 3G représente, en effet, une véritable opportunité pour ces MVNO qui pourront faire jouer la concurrence et ainsi accéder au réseau 3G à un meilleur prix.
En réponse à ces recommandations, la société Free souligne l’intérêt économique que représentent les MVNO et s’engage à introduire une meilleure transparence sur le marché de gros leur proposant une offre complète et publique d’accès à son réseau (12).
Ces nouveaux engagements énoncés dans le compte-rendu de l’ARCEP traduisent la rigidité du marché de la téléphonie mobile français d’un point de vue économique et technique (13).
Vers une nouvelle configuration du marché français ?
« Innover et réduire les coûts » semble être le mot d’ordre des trois opérateurs mobiles historiques qui se préparent désormais à l’arrivée de Free à qui ils reconnaissent une qualité d’innovation (14) (la société fut notamment pionnière en matière d’offre « Tripleplay » à bas prix).
Si Jean-Ludovic Silicani, nouveau président de l’ARCEP estime, dans une interview accordée aux Echos, qu’il n’y aura pas de « guerre des prix sur le long terme », l’attribution de la licence 3G à Free suscite d’ores et déjà le mécontentement des trois grands (15). La fin de l’exception française en matière de téléphonie mobile est entérinée.
La France n’a pu résister au jeu concurrentiel voulu et encouragé par le Parlement européen : l’attribution de la quatrième licence 3G est intervenue au jour de l’entrée en vigueur du Paquet Télécom (16).
Dans l’attente d’une transposition de la nouvelle réglementation en droit interne, La France anticipe une mutation de son marché de téléphonie mobile en conformité avec la volonté du législateur européen qui souhaite « encourager les investissements et la concurrence dans les réseaux d'accès de nouvelle génération »(17).
Sébastien Galli et Delphine Herbo
Master II NTIC, Versailles - St Quentin, promotion 2009 – 2010
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(11) Avis n° 2008-0702 de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes en date du 24 juin 2008 sur la demande d’avis du Conseil de la concurrence portant sur les freins au développement des opérateurs mobiles virtuels sur le marché de détail de la téléphonie mobile.
(14) Extrait de l’article du journal les Echos du 18 décembre 2009 « Les trois opérateurs mobiles se préparent à l’arrivée de Free ».
(15) Interview de Jean-Ludovic Silicani, président de l’ARCEP, Fibre optique : "L'intérêt général, ce n'est pas l'intérêt d'un seul opérateur" Les Echos, le 23 juin 2009.
(16) JO de l'Union Européenne du 18/12/2009, L337.
(17) Le “ Paquet Télécom “ adopté par le Parlement européen Juriscom.net, Florent Boisneault et Jonathan Keller.