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Rubrique : actualités / Branche : propriété littéraire et artistique / Domaine : droits d'auteur et droits voisins
Citation : Juriscom.net, Benoît Tabaka , Après la musique, les internautes pourront s'échanger des oranges ... en prison , Juriscom.net, 02/08/2003
 
 
Après la musique, les internautes pourront s'échanger des oranges ... en prison

Juriscom.net, Benoît Tabaka

édité sur le site Juriscom.net le 02/08/2003
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"Les parents, ils n'ont pas l'temps, de nous parler
croulant sous les sous et les soucis
Tant pis, On se console, sur nos consoles
On s'connecte, sur la planete, Internet
."
(Zazie, Cyber)

Vu du vieux continent, la pléthore d'ordonnances obtenues par l'industrie musicale américaine dans le but d'identifier les gros utilisateurs des réseaux peer-to-peer - principalement des mineurs - était perçue comme une nouvelle superproduction hollywoodienne. Seulement, des mesures récemment prises en Espagne tendent à une généralisation de la poursuite des heavy-users de l'échange de fichiers contrefaisants.

En effet, le 17 juillet 2003, Landwell Espagne, cabinet d'avocat correspondant de PricewaterhouseCoopers, a publié un communiqué indiquant qu'il allait entamer des poursuites judiciaires à l'encontre de 4000 utilisateurs ibériques de la plate-forme d'échange de fichiers Kazaa. Premiers des 95.000 internautes dont l'adresse IP a été relevée, ces derniers sont suspectés d'avoir échangés des films, des fichiers musicaux et des logiciels protégés par le droit d'auteur.

L'annonce par le cabinet d'avocat de cette décision a fait naître une magnifique corrida juridique entre experts du droit des nouvelles technologies. Pour Carlos Sanchez Almeida, l'un des spécialistes espagnols, l'échange de fichiers musicaux ne peut constituer une infraction pénale au sens de l'article 270 du Code pénal. En effet, indique-t-il, "Mettre à la disposition des internautes des fichiers gratuitement peut constituer une infraction vis-à-vis du droit civil, mais en aucun cas un crime dès lors qu'est absent l'un des éléments constitutifs de l'infraction pénale : la volonté d'en tirer un profit économique". Il poursuit en indiquant que dans ces conditions, "la validité des informations obtenues devraient être viciée".

En réponse, Javier Ribas, avocat chez Landwell, précise que le profit doit s'analyser comme "le gain ou le bénéfice que l'on tire de quelque chose" et ceci aussi sous forme monétaire ou en termes d'utilité. Il relève que "lorsque nous parlons de programmes informatiques destinés à une utilisation professionnelle, le profit consiste dans un bénéfice clair qui sera obtenu lors de l'intégration de ce logiciel dans la chaîne de production". Vis-à-vis des internautes, le bénéfice provient également de l'économie réalisée en l'absence de l'acquisition de l'œuvre originale.

Cette plainte, outre de soulever un tollé de protestation dans les nombreux forums de discussion, prend également une dimension politique. En particulier, Félix Lavilla Martinez, membre de la Commission sénatoriale sur la société de l'information, indiquait à Wired que "l'article 18.3 de la Constitution espagnole dispose que les communications privées ne peuvent être interceptées que sur décision judiciaire (…) Même s'il s'agit de données basiques, ils violent la loi si ils n'obtiennent pas préalablement à la localisation des fichiers une décision de justice".

Ainsi, après le Danemark où une société de gestion de droit avait adressé plus de 150 injonctions de payer à divers utilisateurs de réseaux d'échange, l'Espagne se lance à la poursuite des consommateurs de musique en ligne. Seulement, et les actions menées aux Etats-Unis et en Australie le démontrent, les personnes visées par les plaintes sont principalement des mineurs (voire leurs parents, grands-parents ou écoles titulaires des abonnements) qui ne sont pas forcément les mieux à même de connaître les principes juridiques applicables dans la société de l'information. Une récente étude australienne, menée par l’industrie musicale, montrait que plus de la moitié des mineurs téléchargeant des fichiers contrefaisant ne connaissait pas leur caractère illicite.

Benoit Tabaka
Membre du Comité éditorial de Juriscom.net

 

 


 

 

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